Toutes les religions monothéistes ont été, à leur origine, l’équivalent de nos Constitutions actuelles : des systèmes de valeurs dirigeant le fonctionnement d’une société. Ceci étant, et avec la suprématie progressive de l’économie de marché, les religions ont été progressivement vidées de leur contenu, comme en témoigne la dissociation flagrante entre foi proclamée et ‘comportements concrets’…
Si pendant longtemps, nous n’avons parlé que de « sécularisation » - phénomène selon lequel on pensait que la religion allait progressivement se métamorphoser, puis se dissoudre, les faits se sont inversés, laissant place à la « désécularisation », signifiant l’essor de mouvements religieux identitaires et conservateurs. Peter Berger, sociologue des religions américain, constate d’ailleurs que « le monde est toujours aussi furieusement religieux qu’il l’a toujours été ».
A partir des tendances actuelles, des observateurs avisés ont offert un panorama possible des religions dans le monde à l’horizon de 2050. Le christianisme accentuerait son avance sur les autres religions. L’islam continuerait de progresser par sa démographie, mais celle-ci devrait fortement se ralentir, notamment en Europe et en Asie. L’hindouisme et le bouddhisme resteraient à peu près stables, etc.
Mais au-delà de ces grandes tendances, les religions continueront de se transformer et de subir les effets de la modernité, notamment l’individualisation et la globalisation. Aujourd’hui les individus ont une vision de plus en plus personnelle de la religion et se fabriquent leur propre dispositif de sens. Tant que se poursuivra le processus de mondialisation, les religions continueront de fournir des repères identitaires à des individus qui se sentent culturellement envahis ou dominés. Et tant que l’homme sera en quête de sens, il continuera à chercher des réponses dans le vaste patrimoine religieux de l’humanité.
Alors, pourquoi la religion a-t-elle une place si importante dans la vie des hommes d’hier, d’aujourd’hui et sans doute de demain?
Quel rôle peut jouer la religion ? Permet-elle de satisfaire la curiosité humaine ? Permet-elle de normaliser les rapports sociaux en consacrant de son autorité un code de conduite et un système de représentation ?
Quelles sont les limites de l’adaptation de la religion aux effets de la modernité ?
En bref, quel scénario pour l’avenir des religions ?
C’est à ces questions qu'ont tenté de répondre nos intervenants, Jeudi 31 Octobre 2013, à 18h30, à la salle de conférences de HEM Rabat.
-Jean BAUBEROT : Sociologue et professeur émérite
-Albert GUIGUI: Grand Rabbin de Bruxelles et représentant à la Conférence des Rabbins Européens auprès de l'Union Européenne
-Monseigneur Vincent LANDEL: Archevêque catholique de Rabat
-Ghaleb BENCHEIKH: Présentateur de l'émission Islam sur France 2. Préside la conférence mondiale des religions pour la paix et appartient au comité de parrainage de la coordination française pour la Décennie de la culture de non-violence et de paix.
La modération a été assurée par :
-M. Jean-Noël FERRIE: Directeur de recherche au CNRS, Directeur adjoint du Centre Jacques Berque
